Grâce à la netteté et à la précision de ses conseils, ce dernier s’attira très vite la sympathie de tous et il apparaissait légitime pour les élèves lors du décès de Jules André que Victor LALOUX soit désigné pour le remplacer. Cependant ce fut Constant MOYAUX (15/06/1835 – 11/10/1911) qui fût désigné par le ministre de l’Instruction. La quasi-totalité des élèves de l’atelier n’acceptèrent pas cette décision et décidèrent de quitter l’École, pour pouvoir fonder un nouvel atelier libre avec comme chef d’atelier, Victor LALOUX.
[…]Le 30 janvier 1890, Jules André fut ravi à l’affection des siens et de ses nombreux élèves dont beaucoup devaient devenir des maîtres. Je peux bien dire que c’est lui qui menait alors le haut enseignement de notre chère École.
Rien n’était plus naturel que la désignation officielle de Laloux pour le remplacer comme professeur de l’un des trois ateliers. Il fallait cependant une décision ministérielle. Un groupe d’anciens tenta une démarche auprès du ministre de l’Instruction publique qui nous reçut le plus aimablement du monde, et naturellement, nous laissa partir en nous permettant d’espérer.
Notre déception n’en fut que plus profonde, quand nous apprîmes, peu après, que Moyaux remplacerait André.
Nous avions, en ce temps-là, la tête chaude ! Nous décidâmes que nous ne laisserions pas les choses se passer ainsi. Nous convînmes, d’un accord presque unanime que nous quitterions l’École, où le nouveau professeur pourrait faire, en toute liberté, ses corrections dans un atelier vide.
Un soir donc, vers neuf heures, nous mobilisions. Nous voilà qui déménageons la bibliothèque, les planches, les châssis, les chandeliers. Vous pensez bien que les gardiens n’entendaient pas nous laisser faire ! Il s’ensuivit une grave échauffourée. Je vois encore le brave portier Cazamaïou nous barrant la porte de la rue Bonaparte. Ce fut en vain… Nous chargeons, le fougueux Planckaert, dit « Chacha », en tête. Rien ne pouvait résister à Planckaert. Les livres de la bibliothèque volent comme des plumes par-dessus la grille de l’École ! Nous passons !
Le matériel fut déposé de-ci, de-là, on en entreposa une grande partie chez Martin, le bistro d’en face. Une moitié de la bibliothèque alla chez le camarade Charles Randon, 11 rue Bonaparte ; le reste dans le logement que j’occupais avec Planckaert et Guilbert, 9, rue des Feuillantines.
Le lendemain même, nous trouvions un local vacant, une boutique et un entresol, 7, place Furstenberg. En ces temps heureux, c’était plus facile qu’aujourd’hui.
Nous n’étions d’ailleurs pas plutôt installés que, la procédure s’en étant mêlée, il nous fallut restituer, après des sommations par huissier, une partie de la bibliothèque et du matériel. C’est qu’il y avait parmi nous trois ou quatre dissidents…
Nous ne pûmes que nous incliner. L’atelier Laloux n’en était pas moins fondé. Nous n’eûmes plus, dès lors, d’autre souci que celui de nous installer et de travailler.
Ce que nous voulions, c’est montrer à toute l’Ecole que nous n’étions pas seulement des tapageurs, mais que nous entendions nous rendre dignes de nos devanciers par notre travail et nos succès…»