Fanfare Octave CALLOT : Deux disques qui ne virent pas le jour (1966 & 1968)

Publication Auteur
Avril 2020
Pierre-Edouard CALONI
dit " Calo "

Devait-on faire une rubrique sur des disques qui ne dépassèrent pas le stade de l'enregistrement ? Objectivement, cela n'allait pas dans le sens de cette rubrique qui se voulait matérielle, de belles envolées philharmoniques bien gravées sur la cire, le vinyle ou autres matériaux magnétiques ou numériques, le tout bien enveloppé dans de plus ou moins belles pochettes. D'un autre coté, devait-on laisser de coté ce qui aurait pu être de beaux disques dont le lecteur assidu de cette rubrique n'aurait jamais entendu parler. C'est donc de manière totalement subjective que l'auteur de cette rubrique a décidé de parler de ce qui auraient pu être les 11ème et 12ème disques gravés par la fanfare Callot-Madelin. Si l'on compte le 13ème, En Souvenir de Lille, dont nous avons parlé précédemment, cela faisait trois rendez-vous manqués avec les auditeurs assidus et nombreux (!) de la fanfare des Beaux-Arts.

1966 :

Du premier, nous n'avons pas de trace sonore et il y a tout lieu de le regretter tant l'expérience avait quelque chose de nouveau en touchant à la sacro-sainte formule de la fanfare en y adjoignant une guitare et une guitare-basse. De quoi faire remuer dans les chaumières. Les avis, bien sûr, divergent sur ce sujet et on sent qu'il reste encore une certaine forme de ressentiment à l'évocation de cette aventure avortée.

La Fanfare entre en studio pour enregistrer un disque, Blaire nous raconte : "Pour la petite histoire, il y a eu un début d’enregistrement Callot en 66 qui a foiré parce qu’on s’est aperçu que l’éditeur nous imposait des guitares électriques par dessus nos morceaux. J’ai été le premier à quitter le studio, furibard, parce que je ne voyais pas ce que venaient foutre ces guitaristes yéyé sur notre musique ! Le disque n’est jamais sorti. "

Lharidelle m'expliquait, lors d'une conversation téléphonique avant son décès, que cela avait duré toute la nuit, que c'était tendu et "chiant" et que les guitaristes professionnels n'étaient pas contents. Dans ses mémoires(1), il écrit :

"On assista (on ne fut jamais foutus de retrouver la date exacte, tant tous s'étaient dépêchés d'oublier un évènement si calamiteux) à un enregistrement, ou pour être plus précis, une tentative d'enregistrement, avec un groupe de guitaristes électriques, et pour le moins qu'on puisse dire est que personne ne compris très bien à qui l'on était redevable de cette énormité (l'instigateur fit tout pour se faire oublier) ni ce qu'il espérait tirer de l'expérience. L'assistance fut nombreuse à tenter d'élucider ces angoissantes questions. Toute la nuit, des observateurs impartiaux, tels Ahmedée, Wlad, Le Gros ou Lharidelle assistèrent aux efforts des meilleurs d'entre eux, sans que rien de palpable n'en sorte. Ils finirent la nuit, affalés sur leurs pupitres, visiblement à la limite de leur résistance physique, et nerveuse, pendant que ça et là, quelques irréductibles continuent de couper en quatre des partitions qui auraient dues l'être en mille, depuis bien longtemps. A cet égard, la tête de Jeff Mariette était particulièrement parlante. Formidable musicien d'instinct, il était littéralement pétrifié par l'inanité de cette agitation. Dont, bien sûr, il ne sortit rien de rien..."
Le constat est sévère...


Photo-1_Fanfare-Octave-CALLOT.jpg

Deneux, Mousseau, Mariette, Rippe

Photo-2_Fanfare-Octave-CALLOT.jpg

Doladille, Lemétais, Deneux

Photo-3_Fanfare-Octave-CALLOT.jpg

Lemetais, Doladille, Chollet, Blaire, Callot et ... les deux guitaristes

Photo-4_Fanfare-Octave-CALLOT.jpg

Rippe, Blaire, Mariette

Photo-5_Fanfare-Octave-CALLOT.jpg

Callot, Penchet

La fameuse séance de 1966


A contrario, pour Lemétais, les guitaristes étaient prévus dès le départ compte tenu du répertoire envisagé dont: "Noir, c'est noir", "Je ne reconnais plus personne en Harley-Davidson" et d'autres chansons du répertoire yéyé, notamment de Johnny Halliday. Lemétais considère que cette séance aurait pu aboutir à un résultat différent pour un répertoire différent...
Différences de vues entre Blaire, Lharidelle et Lemétais ! Malheureusement, il ne reste aucune trace sonore de cette séance et on peut le regretter car cette expérience trans-instrumentale aurait mérité une écoute.

1968 :

Autre disque avorté, un enregistrement entrepris au Studio Acousty sous la direction artistique de Le Landais, élève sculpteur égaré dans la production. "Le Landais pensait qu'enregistrer des chansons de Montéhus était bien dans l'air du temps et que nul n'était plus qualifié pour assurer une telle prestation musicale, que la fanfare". Les arrangements avaient été fait par Doladille (Le Bib). "... les séances trainaient en longueur et les arrangements étaient très difficiles..." dit Lharidelle qui pourtant ne jouait pas, "n'étant pas assez bon" (sic). Au bout d'un nombre important de séances tout au long d'une huitaine de jours, ce fut le fiasco et les propriétaires du studio mirent fin à l'opération. Lemétais estime quant à lui que ce n'était sans doute pas un problème d'arrangements mais peut-être de tonalités peu usités en fanfare.

Là encore, on peut regretter que le projet n'ait pas été au bout. Les fanfares passaient en 68 pour être l'image vivante de l'ancienne école, réactionnaires ! Ce projet peut aussi démontrer le jugement peut-être un peu rapide de cette.allégation.

Mais parlons d'abord du sujet principal de cet enregistrement : Montéhus. De son vrai nom, Gaston Mardochée Brunswick, Montéhus est connu comme auteur de chansons engagées pour soutenir le monde ouvrier, la lutte contre la prostitution, la lutte contre la guerre. Né en 1872, il sera l'ami de nombreux autres compositeurs engagés comme Jean-Baptiste Clément, auteur du Temps des Cerises, ou Eugène Pottier, auteur de l'Internationale. Ami aussi de Lénine qui aimait l'écoutait chanter, il se rendra célèbre en 1907 en créant la chanson Gloire au 17ème, en hommage au 17ème régiment d'infanterie qui fraternisa avec les manifestants, vignerons en révolte, à Béziers(2).
Très engagé anti militariste, il connait une période plus ambigüe au moment de la première guerre mondiale où il écrit un certain nombre de chansons bellicistes, chantant alors La Guerre Finale, détournant ainsi L'Internationale. Après la guerre, il est délaissé et n'apparait plus avant le Front Populaire, l'écriture de La Butte Rouge en 1923, mise à part.

Portrait-Montehus_Gaston-Mardochee-Brunswick.jpg

Montehus


Dans son livre(1), Lharidelle écrit :

"...la fanfare s'escrima à un enregistrement dans un studio du quartier, le Studio Acousty(3), dont le directeur artistique était un gars de l'école, deux circonstances des plus positives. Ce Le Landais, sculpteur égaré dans la production, s'était dit que sortir un disque des chansons de Montéhus était bien dans l'air du temps, et que nul n'était plus qualifié, pour assurer une telle protestation musicale, que la fanfare. On n’allait évidemment pas le contredire.
Un petit commando de musiciens capables de lire sur partitions fut constitué. Paulo et Milo au buggle, Schultz et Le Bib à la trompette, le Chef et Penchet à la basse, Mariette et Rippe au trombone, Ronchon ou Philippot à la contrebasse et Malabre à la batterie. Ce n'était pas vraiment parti pour rigoler, mais heureusement, outre Paulo et le Bib, le pupitre des choristes et accessoiristes comptait aussi Lestang, Wlad, le Gros et le docteur Laigner, dit Fouilletrol. Les autres furent autorisés à assister, mais en silence (avec toutefois permission de participer aux choeurs) à des séances d'enregistrements qui s'étalèrent sur une huitaine de jours.
Au programme, On ne devrait pas vieillir quand on est ouvrier, La Butte Rouge, Clairvaux et Les Mains Blanches. Plus deux autres titres n'ayant à voir et on se demande ce qu'ils étaient venu faire là: Good night, par ailleurs très convenable et une niaiserie yéyé, Une minute trente cinq de bonheur, qui ne s'avéra jamais foutue de tenir la moitié de ses promesses.
Disons-le tout de suite, l'affaire se solda par un fiasco complet, bien qu’on n’ait pas mal rigolé en cours de route, avec le premier titre, qui donna lieu à deux versions réjouissantes, la seconde se sauvant d'un thème trop étriqué par une fin en apothéose sur l'air de l'Internationale, récemment répétée dans les beaux quartiers, de façon si providentielle(4). Dans les deux prises, Lestang et Laigner furent remarquables, le premier exécutant sur un mirliton, ou quelque chose de similaire, une fabuleuse parodie du discours d'Alger de De Gaulle "Français, françaises, je vous ai compris". Le reste fut moins bon, sauf sur La Butte Rouge, où Schultz sortit, et fort bien, une sonnerie à la Miles Davis complètement décalée sur le chant assuré par Paulo des Batignoles, en pleine forme.
Par contre, Clairvaux sans Fernier, retenu ailleurs, ne convainquit pas grand monde, quant aux Mains Blanches, elles furent la cause du naufrage de l'entreprise. Pour l'occasion, le Bib s'était fendu d'une partition sans doute talentueuse, mais bien trop compliquée et, comme s'est souvent le cas, dans son désir de prouver que la complication était plus apparente que réelle, l'auteur de ce morceau de bravoure s'entêta, au grand dam du reste des musiciens. Qui répétèrent cinq fois, dix fois, vingt fois la partition contestée qui finit par devenir leur bête noire et une source inépuisable de moqueries, jusqu'à ce qu'on renonce, par accord tacite, à une aussi déraisonnable entreprise.
Le malheur voulut que lors de la mise en boite de Good night, une des deux trompettes se soit présentée à un bon quart de ton en-dessous de la tonalité requise, avec pour résultat une prise inutilisable, ce qu'on apprit le lendemain, trop tard. Pour finir la minute et quelques de bonheur fit long feu...
Bref, avec seulement trois morceaux exploitables au bout d'une semaine d'efforts, la fanfare fut remerciée. Le pauvre Le Landais peut-être bien aussi..."


Participaient à cette séance : Lemetais, Chollet, Doladille, Deneux aux trompettes, Mariette et Rippe aux trombones, Callot, Crespel, Penchet aux basses, Espinasse à la contrebasse, les frères Hervé, piano et batterie, chants assurés par Lemétais, Day, Lestang, Laisnier.

Le disque ne sort donc pas mais il existe une trace de cet enregistrement dans lequel on peut notamment entendre :

  • On ne devrait pas vieillir quand on est ouvrier
  • La Butte Rouge
  • Clairvaux
  • Les Mains Blanches
  • N'insultez pas les Filles
  • Good Night
  • 2'35 de Bonheur
Ces bandes m'ont été passées par Lharidelle et depuis par Lemétais à qui Céline CHOLLET avait donné une reprise mp3 remasterisée. Merci à eux.

Alors, sans doute pour la première fois, vous pourrez écouter ces enregistrements en suivant ce lien.

Notes :


(1) Histoire Edifiante et Véridique de la Grande Fanfare Malaquais. Adrien LHARIDELLE & Co - Editions Lulu.com (retour)

(2) Ce thème a été joué et enregistré par la Fanfare Bolchévique de Prades-le-Lez, Disques Vendémiaire, réf. : VDES 046, 1979. Cette fanfare dont le nom ne cache pas son orientation, fut assez célèbre dans les années 70, rare fanfare du sud à jouer à l'époque dans l'esprit musical des fanfares des Beaux-Arts, son répertoire mis à part. (retour)

(3) Le studio Acousty était situé au 34 rue de Seine. (retour)

(4) Nous sommes en mars 1968, Lharidelle raconte qu'un membre de la fanfare propose de monter l'Internationale en passe devenir un tube. Callot était d'autant plus enthousiaste que la partition originale comptait pas moins de 8 voix de basse ! Le projet mit un certain temps à voir le jour... (retour)

N'insultez pas les filles
1906 - Musique de Raoul Chantegrelet

Ah, combien de jeunes ouvrières
Ah, combien de petits trottins
Qui voudraient, ayant l'âme fière
Qui voudraient suivre le bon chemin !
Mais hélas, les patrons d'usine
Sont pour elles, maint'nant sans pitié
Ils leur versent des salaires de famine
Voilà pourquoi y a tant d'prostituées

{REFRAIN} N'insultez pas les filles
Qui s'vendent au coin des rues
N'insultez pas les filles
Qu'la misère a perdues
S'il y avait plus d'justice
Dans notre société
On n'verrait pas tant d'vices
S'étaler su' l'pavé

Oui mon coeur bondit de colère
Quand je vois de ces exploiteurs
Qui sans honte vivent de la misère
Et de plus sont couverts d'honneur
Ces gens-là vous parlent de morale
- Taisez-vous, baissez votre front !
Car c'est vous, qui avez les mains sales
La misère n'est pas un affront

{AU REFRAIN}

Quand on rafle ces pauvres filles
Comme c'est pas du monde aristo
On les jette comme de vraies guenilles
Dans l'panier qui part au dépôt
Mais quand c'est des catins très viles
Femmes du monde qui font des sales coups
On leur offre une automobile
Et les juges sont à leurs genoux

Respectez donc les filles
Qui s'vendent au coin des rues
Respectez donc les filles
Qu'la misère a perdues
Pour qu'l'erreur soit sérieuse
Montez dans les salons
Vous y trouv'rez des gueuses
Qui versent leur poisonortune
On n'devrait pas blanchir quand on n'a pas de sous
Allons va Jean-Guenille subis ton infortune


Ils ont les mains blanches
1910 - Musique de Raoul Chantegrelet

Voyez donc cet aristocrate,
Pâle gommeux qui fait des épates,
Il passe sa vie à nocer,
A vingt ans c'est déjà cassé.
Comme une femme ça a des faiblesses,
Ca veut jouer à l'ancienne noblesse,
Incapable de gagner son pain,
Voilà le type du vrai gandin.

{REFRAIN} Il a les mains blanches
Les mains maquillées
Il a les mains blanches
Par la honte souillées
Ça sent la paresse, c'est mou, d'est gnangnan
Voilà c'qu'on appell' des mains de feignant !

Voyez donc ces hommes en soutane,
Soi-disant sur eux l'Bon Dieu plane,
Ils prônent Moïse et Jésus-Christ,
Mais font l'contraire de leurs écrits.
Oui Moïse était un apôtre,
Jésus-Christ mourut pour les autres,
Tandis qu'vous, prêtr's, pasteurs, rabbins,
Votre but, c'est l'or, le butin !

{REFRAIN} Ils ont les mains blanches,
Les mains maquillées,
Ils ont les mains blanches,
Par la honte souillées.
Ca sent le tartuffe, l'avare, le gripp'sous
Voilà c'squ'on appelle des mains de filou !

Voyez donc ces hommes politiques,
Vrais paillasses à gueule tragique,
Qui pour aller au Parlement
Au peuple font du boniment :
J'vous promets les r'traites ouvrières,
J'vous promets la fin d'vos misères,
Ils se votent d'abord et comment !
Pour eux-mêmes quarante-et-un francs !

{REFRAIN} Ils ont les mains blanches,
Les mains maquillées,
Ils ont les mains blanches,
Par la honte souillées.
Ca sent le roublard, ça sent le malin,
Voilà c'qu'on appelle un poil dans la main !

Voyez donc cette foule tapageuse,
Que'qu' fois gaie, souvent malheureuse,
Oui ce sont de brav'ouvriers,
C'est la masse des sacrifiés.
Ils reviennent du bagne de l'usine,
Ils sont pales, ils ont mauvaise mine,
Hommes et femmes, vrais gueux, meurt-de-faim
Qui engraissent un tas de coqins !

{REFRAIN} Leurs mains n'sont pas blanches,
Ils ont travaillé,
Leurs mains n'sont pas blanches,
Elles sont meurtries, broyées.
Ca sent le courage, la force et l'honneur,
Voilà c'qu'on appelle des mains d'travailleurs !

La Butte Rouge
1923 - Musique de Georges Krier

Sur cette butte là y'avait pas d'gigolettes
Pas de marlous ni de beaux muscadins.
Ah c'était loin du Moulin d'la Galette,
Et de Paname qu'est le roi des patelins.
C'qu'elle en a bu du bon sang cette terre,
Sang d'ouvriers et sang de paysans,
Car les bandits qui sont cause des guerres
N'en meurent jamais, on n'tue qu'les innocents !
La butte rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd'hui y'a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boira d'ce vin là, boira l'sang des copains.

Sur cette butte là on n'y f'sait pas la noce
Comme à Montmartre où l'champagne coule à flots,
Mais les pauvr's gars qu'avaient laissé des gosses
Y f'saient entendre de terribles sanglots...
C'qu'elle en a bu des larmes cette terre,
Larmes d'ouvriers et larmes de paysans
Car les bandits qui sont cause des guerres
Ne pleurent jamais, car ce sont des tyrans !
La butte rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd'hui y'a des vignes, il y pousse du raisin,
Qui boit de ce vin là, boit les larmes des copains.

Sur cette butte là, on y r'fait des vendanges,
On y entend des cris et des chansons :
Filles et gars doucement qui échangent
Des mots d'amour qui donnent le frisson.
Peuvent-ils songer, dans leurs folles étreintes,
Qu'à cet endroit où s'échangent leurs baisers,
J'ai entendu la nuit monter des plaintes
Et j'y ai vu des gars au crâne brisé !

La butte rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd'hui y'a des vignes, il y pousse du raisin.
Mais moi j'y vois des croix portant l'nom des copains...


On n'devrait pas vieillir
1906 - Musique de Raoul Chantegrelet

On n'devrait pas vieillir quand on n'a pas d'fortune
On n'devrait pas blanchir quand on n'a pas de sous
Allons vas'en guenilles, subis ton infortune
Tout cela finira quand tu s'ras dans l'grand trou

Mais bon Dieu, que fait-on sur la Terre
Vivre sans pain, sans gîte et sans souliers
Etant jeune on s'fiche de la misère
On n'devrait pas vieillir quand on est ouvrier
On n'devrait pas vieillir quand on est ouvrier

Avoir des cheveux blancs c'est l'entrée aux galères
Avoir des cheveux blancs, oui c'est perdre son pain
C'est la double infortune de vieillesse ou misère
Ah, l'horrible tableau, un vieillard mourant d'faim !

Être vieux, c'est casser sa machine
Pour le patron, c'est un' bête estropiée
On accepte un salaire de famine
On n'devrait pas vieillir quand on est ouvrier
On n'devrait pas vieillir quand on est ouvrier

Quand tout à fait usé les forces vous abandonnent
Brisé par la fatigue on reste sur le chemin
Alors sans perdre de temps, vite, le patron ordonne
Et dit : "Faut le changer, cet homme finira d'main"

Triste, épuisé, on part sur la route
L'âme brisée, l'esprit sans raison
Et parce que l'on demande une croûte
La Justice vous condamne à six mois de prison
La Justice vous condamne à six mois de prison

A vous qui dirigez la France, la République
A vous les députés, à vous les sénateurs
Oui c'est à vous Messieurs que j'fais cette réplique
Au nom de ceux qui vivent dans l'éternel malheur

Quand dans une puissance comme la France
On interdit la mendicité
Faut interdire d'abord la souffrance
Et faut mettre en pratique ce mot : Fraternité‎
Et faut mettre en pratique ce mot : Fraternité‎