OTELLO « Et sa Fanfare des Beaux-Arts à la Pêche »
Philips P 70.311L - Microsillon 30cm, 33T - 1965

Publication Auteur
Décembre 2018
Pierre-Edouard CALONI
dit " Calo "

Encore une major pour produire un disque d'une fanfare des Beaux-Arts, cette fois c'est Philips. Le disque se présente d'abord avec une coquille de taille, une faute d'orthographe au nom de la fanfare qui est OTELLO (prénom du patron, Zavaroni) et non OTHELLO, certes plus connu dans le monde culturel(1). Michel LÉCREVISSE écrit à ce propos : "Tout le monde a bien compris qu'il fallait lire (le titre) sans H, et à la neige, c'est un double gag, sauf le premier. Ceux qui ont édité cette pochette étaient trop ou pas assez cultivés."


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Recto de la pochette.


Michel LÉCREVISSE décrit ainsi la pochette : "En couverture, on voit de gauche à droite une "skyline" triomphante : Attilio RUBINI à la basse qui regarde de haut Philippe TAILARDAT, peintre, trombone à pistons et fameux pour sa Morgan : Michel DASSIER, seul avec une basse dont il ne joue pas. Son instrument est à ses pieds, frappé par un autre (voir plus loin). François CUVELIER, dit Cucu, et sa basse, jubilant. Daniel Rochette, groupie en chemise mais qui semble heureux d'être là. Mon inconnu à l'alto, j'ai oublié son nom mais pas son visage. Au centre de son plexus, Jean-Jacques JOHANNET (Jirube) à la basse et, sous son bras gauche, Pierre AUBIN, sculpteur, à l'hélicon, qui maitrisait de façon remarquable un énorme saxophone baryton. Debout, grand, fort, Robert PHILIPPOT, au bombardon. C'est d'ailleurs ce dont il joue dans ce disque contrairement à ce qui est dit au verso...


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Recto de la pochette - Trombinoscope


...En "basse ligne", il y a tous ceux qui se vautrent dans la neige ou veulent s'y terrer : Sylvain GOLDFARB qui a échangé sa caisse claire contre la grosse caisse de Michel DASSIER. A droite, au premier plan Remi MASSON, première trompette, bien sûr mis en valeur, mais qui cache un peu Jean-Baptiste BOISSET, basse et chef, au deuxième plan. Au troisième plan, ce n'est pas un garçon mais une groupie, Agnès GROSJEAN à qui l'on a dû mettre des lunettes et une barbe pour passer la censure. A sa droite, Michel LÉCREVISSE au trombone à pistons. Enfin, plus à droite, Jean-Yves TERLAIN, navigateur(2), avec un cornet dont il n'a jamais joué et, tout à fait à droite, Philippe BENSIMON, dit Ben, notre saxo-tenor chéri, qui s'illustre bien sur le disque."


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Verso de la pochette.


Lécrevisse continue : " Au verso, ce sont des illustrations anecdotiques. Je passe bien-sur toutes les bites en neige que nous installions sous les télésièges et qui réjouissaient habitants et touristes car jamais la police ne nous a rendu visite. Donc, de gauche à droite et de haut en bas on trouve, souvent en luge car nous nous sommes beaucoup défiés sur les pentes et les routes gelées car j'étais moi-même incapable de skier ou même de voir un ski sans tomber.

Michel DASSIER, les trois grâces Alain BUREL, Jean-Jacques JOHANNET et Pierre AUBIN, Jean-Yves TERLAIN le navigateur.
Jean-Yves TERLAIN à ski, Jean-Baptiste BOISSET et Daniel VIAL à ski.
En troisième ligne (assis dans la neige) Jean-Pierre ERRATH, groupie qui nous a fait le plus beau streap-tease que l'on ait vu et Rémi MASSON (luge).
Quatrième ligne (debout), François CUVELIER et Jikube (luge).
Ensuite, Attilio RUBINI chargeant le canotier de Daniel BUREL puis Michel LÉCREVISSE en chemise sous Jean-Baptiste BOISSET qu'il allait remplacer. Enfin, Michel BARRES, ancien massier de l'atelier Zava et membre de la fanfare d'avant. En dessous, Pierre LEBIGRE, Bernard SWEGERS et Jean-Jacques COLAS, organe.
Comme c'est écrit, nous avons enregistré un 14 juillet. Le studio et l'équipe technique étaient à nous et le vin blanc pour tout le monde !! Les studios Philips étaient à notre disposition grâce à l'entregent de Jikube."

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Verso de la pochette - Trombinoscope


Coté musique le disque fera au moins l'objet d'un commentaire élogieux à sa sortie en obtenant la distinction du plus mauvais disque de la semaine par Jean YANNE(3). Comme quoi, nous dit Véronique FLANNET(4), la fanfare des Beaux-Arts pouvait faire parler d’elle sur les ondes nationales.

Dans son livre, Véronique continue : "...Musicalement, Otello était comme la plupart des fanfares « formée de très bons et de très mauvais musiciens, ce qui en fait leur charme ». On adapte les partitions à ceux qui ne savent pas lire la musique avec la pédagogie dessinée des 3 pistons TTT qui avait fait ses preuves.

La fanfare débute avec les fameux Vienne reste Vienne, Funiculi funicula, El gato montès, Caroline… « Le choix de nos musiques était ringard à mort, inspiré par du mauvais goût, un peu réac. Y’avait pourtant de belles choses à prendre. Difiore a essayé de nous emmener vers le New Orleans… Un regret… On était conservateur, un peu fermé, moi surtout », avoue Rémi MASSON arrangeur et compositeur. Quant aux influences musicales… Les Malaquais ? Les Callot ? « C’était complexe par rapport à eux. En réalité, on ne les connaissait pas beaucoup. On les croisait dans les concours ». Une autre génération.
Otello veut sortir du registre des valses et des polkas, elle cherche des morceaux plus contemporains, fait de nouveaux arrangements..."


FACE A FACE B
  • Musique à Papa « Que le quitten el tapon »
  • Beer barrel polka
  • Tango de l’éléphant
  • Amsel polka
  • Schnauferl
  • Trink
  • La romance du 14 juillet
  • Le clair de lune à Maubeuge
  • Vienne reste Vienne « Wien bleibt Wien »
  • Les catcheurs
  • Ça ne vaut pas l’amour
  • Cakewalk
  • Bergler polka
  • Clairvaux

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Verso de la pochette - Adresse à Léon


D'après Lécrevisse, cette fanfare était composée :

Trompettes : Rémi MASSON, Dominique POIRIER (*),
Sax Alto & Ténor : Philippe BENSIMON,
Turluciphone (jazzoflûte) : Jean-Yves TERLAIN,

Trombones : Bernard SWEGERS, Daniel VIAL,
Trombones à pistons : Michel LÉCREVISSE, Alain BUREL,
Basses : Jean-Baptiste BOISSET, François CUVELIER (Cucu), Attilio RUBINI, Antoine MANACH,
Bombardon : Robert PHILIPPOT,

Caisse claire : Sylvain GOLDFARB, Alphonse HUERTAS,
Triangle : Jean-Jacques JOHANNET (Jikube),
Grosse caisse : Michel DASSIER,
Organe : Jean-Jacques COLAS.

(* )Dominique POIRIER, trompettiste de la Fanfare Aimé Visconti. Comme quoi, les Zavas pouvaient accueillir un Lamache !

Le disque sort donc en 1965, chez Philips sous la référence P70.311l, c’est un microsillon de 30cm, 33 tours et porte le titre de « Othello et sa fanfare des Beaux-Arts à la pêche ».

Ce disque n'a jamais été réédité.

Nous vous laissons ci-après l'opportunité de l'écouter sur ce lien.

Notes :


(1) Nous nevous ferons pas l'offense de vous indiquer qui est Othello mais pour les esprits embrumés, quelques rappels :

  • Othello, le Maure de Venise, est une tragédie de William Shakespeare, jouée pour la première fois en 1604, soit bien avant la fanfare Zavaroni.
  • A l'opéra, peu connu: "Otello ossia Il Moro di Venezia", de Gioachino Rossini composé en 1817 et surtout le magnifique "Otello" de Giuseppe Verdi composé en 1887 et son livret d’Arrigo Boito.
  • Au cinéma une dizaine d'adaptations dont les plus célèbres de George Cukor (1947) et Orson Wells (1952).
(retour)

(2) Jean-Yves TERLAIN est plus connu pour ses exploits comme navigateur que comme architecte ou comme musicien. Dès 1968, il participe à la fameuse Transat anglaise, course en solitaire entre Plymouth en Angleterre en Newport aux USA. Cette course a lieu tous les 4 ans, gagnée en 1960 par Chichester et en 1964 par Tabarly sur Pen Duick II. Terlain arrivera 10ème en 1968. C'est quatre ans plus tard en 1972 que Terlain se fera connaître du grand public en se présentant au départ de cette même transat avec un bateau de 39 m de long, gréé de 3 mats portant des focs baumés. Il paraissait inimaginable de mener seul un bateau d'une telle dimension. Ce bateau, baptisé Vendredi 13, avait été financé par Claude Lelouch. Terlain arriva 2ème derrière Alain Colas à la barre de Pen Duick IV, trimaran conçu par Tabarly. Néanmoins, c'est alors qu'il doublait Vendredi 13 au milieu de l'Atlantique, qu'Alain COLAS imagina qu'un bateau de grande taille était la bonne solution pour cette course. Il se présentera en 1976 à la barre de Club Méditerranée, un quatre mats de 72m ! Mais l'histoire est ainsi faite qu'il arrivera lui-aussi 2ème, derrière...Tabarly à la barre de Pen Duick VI un voilier de 22m conçu pour 18 hommes d'équipages. C'est à partir de cette 5ème transat que les organisateurs anglais décidèrent de changer le règlement dont le concept originel était : "un homme, un bateau", afin de limiter les "extravagances" de ces marins français.

Jean-Yves TERLAIN navigue toujours et s'est mis notamment au service du WWF pour des navigations scientifiques pour la défense de la mer et de ses habitants. (retour)

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Vendredi 13

(3) Jean YANNE, né en 1933, mort en 2003, est un célèbre humoriste de la deuxième partie du XXème siècle. Nous ne ferons pas ici sa biographie mais sa carrière a mélangé les sketches, le cinéma comme acteur et réalisateur et l'animation d'émission de radio. C'est dans ce cadre d'une de ses émissions radiophoniques que Jean YANNE parle de ce disque en ces termes... Notons, qu'en 1968, Jean YANNE dans l'une de ces émissions avait lancé ce slogan humoristique "il est interdit d'interdire" qu'il entendra ensuite comme leitmotiv dans bon nombre de manifestations !
De même, parodiant Hanns JOHST, homme de théâtre allemand qui avait lancé le fameux: « Quand j'entends parler de culture, je sors mon révolver », Jean YANNE, estimant que l'art était un "attrape-gogos" répondait par « Quand j'entends le mot culture, j'ouvre mon transistor ». C'était oublier que Léon MALAQUAIS, homme de fanfare célèbre, avait déjà répondu auparavant par : « Quand j'entends parler de culture, je sors mon trombone à coulisse ». Nous ne pouvons que conseiller nos lecteurs les plus jeunes qui ne le connaitraient pas, de revoir les films de Jean YANNE et d'écouter ses sketches. Celui sur le permis de conduire reste un must, encore bien d'actualité. (retour)

(4) "La Belle Histoire des Fanfares des Beaux-Arts, 1948-1968", Véronique FLANNET - Edition L'Harmattan. (retour)