Nous continuons notre rubrique sur ces disques qui ont navigués en dehors de tout circuit classique.

Voilà encore ce qu'on appelle un disque introuvable ! Comme je disais dans la rubrique précédente, un disque à tirage très limité, un disque qui n'est pas sorti des archives familiales des anciens de l'atelier... Merci donc à notre ami Mannix de m'avoir prêté cet exemplaire appartenant à sa mère Lucie SAMOYAULT-MULLER qui fit ses études au sein de l'atelier Zavaroni.

Ce disque a été enregistré à l'occasion d'une fête donnée par l'atelier pour fêter les 25 ans d'enseignement du patron, fête donnée le 2 juillet 1964 à bord d'un bateau sur la Seine, le Borde-Fretigny.

Le recto de la pochette représente une bouée de sauvetage entourant la caricature d'Otello ZAVARONI, patron de l'atelier éponyme.

Le disque ne comprend qu'une face enregistrée et le macaron est celui du studio sans indications personnalisées.

On peut lire sur les trois volets de la pochette :

" Et la réforme patron ? L'école est foutue ! Vous êtes les Beattles de l'architecture ! Et la réforme patron ? Tous à Bagdad ! Des couilles mon vieux, il faut me gonfler ça ! Les égyptiens sont lourds dans le sac ! "
"Et la réforme, Patron ? La Marine est foutue : à l'abordage du Borde-Fretigny. 2 juillet 1964"

Ces textes se retrouvent comme paroles dans le disque où sur fond de musique joué par la fanfare de l'Atelier, deux morceaux enchainés Petite Musique de Nuit et La Musique à Papa, on entend une parodie de correction de projet du patron à l’atelier :

" (un élève) : - Et la Réforme, Patron ?
(le patron) : - l'Ecole est foutue...(gémissements)

...

(un élève) : - Il parait que vous avez dit, Patron: Massier, tu les as toutes petites...(rires)
(le patron) : -Tu sais pas, ben, faut me gonfler ça, tu sais mon vieux! Tu vas me faire un truc énorme, hein !

...

(un autre élève)(pleurs) : - Et pourquoi j'ai pas touché, Patron ?
(le patron) : - Tu sais, c'est pas grave, il t'a manqué qu'une voix ! (pleurs)
- Votre camarade, il se demande pourquoi ! Il avait mis la sauce, il avait oublié l'poulet... il avait oublié l'poulet. (des élèves) : - le poulet, aime bien l'poulet !

...

(le patron à une élève) : - Vous savez, mademoiselle, il faut vous donner tout entière à l'architecture.
(une élève) : - Oh moi, vous savez patron, j'demande pas mieux de me donner toute entière (rires). (des élèves) : - Ouaf, ouaf, ouaf

...

(le patron) : - hum, tu sais pas pourquoi, hein ! Tu sais pas, hein ! Hein, hein il sait pas ! Mais il va en pisser des lames de rasoir...
(un élève puis d'autres) : - Mais au fait ce disque, c'est pas pour nous ce disque-là, c'est pour des vieux cons, des vieux cons, des cons vieux, des vieux cons... Etc.

Un grand moment de littérature et de poésie.

Ce disque a donc été enregistré pour être offert aux invités de la fête donnée par l'atelier pour les 25 ans d'enseignement d'Otello ZAVARONI. Otello ZAVARONI, bien que diplômé en 1940 sera enseignant auprès d'André HILT en 1939 désigné Chef d'atelier à la suite du décès d'Alphonse DEFRASSE. Zavaroni prendra la suite de Hilt comme chef d'Atelier en 1944 ⁽¹⁾. Cette fête fut notamment organisée par Lucie SAMOYAULT-MULLER et Luc-Régis GILBERT.

Lucie SAMOYAULT-MULLER raconte : "Le Patron avait été cherché en Rolls Royce, à son domicile boulevard Hausmann, par quelques anciens dont Luc-Régis Gilbert (habillé en chauffeur de maître) et conduit jusqu'au quai de Seine pour l'embarquement sur le "Borde-Fretigny". Un tapis rouge avait été installé depuis les quais jusque sur la passerelle du bateau. Cette première partie de soirée "Dîner-spectacle" réunissait les grands anciens de l'atelier. A cette occasion, il avait été fabriqué spécialement par le Chapelier Gélot des casquettes plates avec motif écossais portés par tous les Anciens sachant que moi, étant une fille je portais une casquette Sherlock Holmes motif écossais⁽²⁾. 

Sur le Borde-Fretigny⁽³⁾ eut lieu un dîner pendant lequel il avait été prévu un spectacle de strip-tease".

Une médaille commémorative gravée par Raymond Joly (1er Grand Prix de Rome de Gravure en médailles 1942) fût remise au Patron à cette occasion. Le moule en résine est aujourd'hui conservé par Lucie SAMOYAULT-MULLER :

Le soir, les invités qui se trouvaient à bord furent débarqués à "La Belle Gabrielle" guinguette "amarrée" au 15, quai Galliéni au Pont de Suresnes pour un Pince-Fesse semble-t-il mémorable.
L’invitation :

FACE A	FACE B
Peetite musique de la nuit La musique à papa fait plaisir à maman	Vide

D'après Lecrevisse, cette fanfare était composée essentiellement de nouvôs de la rentrée 63 :

Trompettes : Jean-Claude DIFIORE, Rémi MASSON, Pascal DUHAMEL,

Trombones : Bernard ZWEGERS,
Basses : Jean-Baptiste BOISSET (Papy), François CUVELIER, Michel LECREVISSE, Attilio RUBINI, Jean-Jacques JOHANNE, Daniel VIAL,
Bariton : Alain BUREL,
Soubassophone : Robert PHILIPPOT,

Caisse claire : Sylvain GOLDFARB,
Grosse caisse : Michel DASSIE.

Lecrevisse raconte :

"Borde-Frétigny, bateau mouche affrété pour fêter les 40 (?)(4) ans d'enseignement du Patron, Otello ZAVARONI, fort bien caricaturé sur la pochette mais que je n'ai jamais entendu jouer de quoi que ce soit. Mais pour le disque autoproduit, il devait bien y avoir parmi cette fanfare de nouvôs de la rentrée 1963 :

• - Jean-Baptiste Boisset, dit Papy, à la basse. Chef et créateur de cette fanfare de nouvôs. Lui, il avait de l’expérience ; lui, il avait fait l'Olympia avec les Malaquai s; lui, il avait peut-être créé et , à coup sûr, joué avec la fanfare des peintres et des sculpteurs les Bonaparte. Mais, jamais il ne l'a ramenée, Zava d'abord, Otello ensuite.
• - Jean-Claude DIFIORE à la trompette, membre fondateur des Haricots Rouges au lycée et qui a préféré les études d'architecture à l'aventure du spectacle qui commence en 1963 pour ce groupe, l'année de son entrée à l'atelier Zava.
• - Bernard ZWEGERS. Doué pour tout, il arrivait des Beaux-Arts du Havre et jouait de la basse mais surtout du trombone à coulisse comme un vrai jazzman.
• - Rémi MASSON. S'il y a eu un vrai musicien chez Otello, c'est bien lui. Pianiste de talent, il se mit à la trompette, bien aidé par Difiore.
• - Pascal Duhamel, il a toujours soufflé en biais dans sa trompette et a toujours assuré, au point de délaisser l'architecture pour l'archéologie où il fit florès.
• Et puis tous ceux qui n'avaient jamais soufflé dans, ou même vu, un cuivre, tout éblouis par leur arrivée à l'Atelier, la découverte du Patron, et qui formaient le troupeau des basses : Alain BUREL, François CUVELIER, Michel LECREVISSE, Attilio RUBINI, Jean-Jacques JOHANNE, Daniel VIAL...
• Je dois confesser que c'est moi qui ait eu l'idée d'ouvrir "La Musique à Papa" que nous maîtrisions à peu près par "La Petite Musique de Nuit" de notre pote Mozart. Je sais qu'il nous en veut pas !
• - Robert PHILIPPOT à la contrebasse, Michel DASSIE, rugbyman au PUF et à la grosse caisse, Sylvain GOLDFARB à la caisse claire.
• Pardon si j'ai oublié l'un ou l'autre d'entre nous, ce n'était qu'il y a cinquante ans !"

Le disque sort donc en 1964, sans référence, c’est un microsillon de 17cm, 45 tours et porte le titre de « BORDE-FRETIGNY».
Ce disque n'a jamais été réédité.

Nous vous laissons ci-après l'opportunité de l'écouter sur ce lien.